L’an vert du décor

, par  UCL49

La « fleur d’or », la ville verte, la ville aux cent milles arbres en cinq ans...La communication sur l’écologie bat son plein et pour cause, « la prise en compte est beaucoup plus forte aujourd’hui qu’il y a 6 ans ». Le politicien féru ne s’y trompe pas. 

Et si l’arbre cachait la forêt et qu’en terre angevine, tout n’était pas que douceur ! Il existe en cette bonne terre angevine, au cœur du quartier populaire Deux Croix /Banchais, une friche industrielle, dont le devenir semble bien durable .L’actuel maire se fit élire en 2014 avec entre autre ces deux objectifs pour ce quartier : « vouloir préserver le cadre de vie » et « revoir la gestion et le traitement des déchets. » N’y voyez aucune ironie dans ce qui suit !

Au cœur de ce quartier, l’ancienne usine Thomson, soixante hectares de friches polluées, abandonnées en 2012. Les habitant·es du dit quartier dont on désirait préserver le cadre de vie. ..on allait s’intéresser à la gestion et au traitement de ces déchets ; ne pouvaient qu’être optimistes.

L’ancienne majorité avait prévu en 2013, une enveloppe de 6,5 millions d’euros pour racheter l’usine et le terrain. Elle devait acquérir également l’outil de production, pour plus d’un million d’euros avec cet objectif : le développement économique local. en faisant du site un tremplin pour l’électronique professionnelle. La dépollution du site était estimée entre 60 000 et 200 000 € .

Sur ce, élection passa et patate chaude on se refila.

En 2014 Christophe Béchu accèda au poste de président de la communauté urbaine, il maintint l’idée d’acquérir le site mais avec une limite : « Moi, je reste acheteur, mais, compte tenu de ce que nous avons découvert, certainement pas à ce prix-là. » En 2015, un rapport d’une société de conseil en ingénierie et en environnement faisait état d’une pollution du site « inacceptable ».

Les sols, en plus d’être pollués aux hydrocarbures étaient bourrés de produits nocifs, auxquels s’ajoutaient une concentration élevée de solvants ou de produits chimiques de nettoyage dont certains réputés cancérigènes.

Dépolluer les lieux, la facture s’élevait entre 4 et 5 millions d’euros. Qui devait le faire ? Pour la municipalité cela incombait au liquidateur et pour ce dernier, c’était a communauté urbaine puisqu’en 2013, le prix de vente en avait tenu compte, passant de 14 M€ à 6,50 M€. En juin 2018, l’estimation du coût de dépollution atteignait les 10 millions d’euros. Et toujours rien n’était fait...

« On n’a pas rien fait... » Attention, Bechu le clame haut et fort. mais la friche industrielle reste toujours là, pour se rappeler à notre mémoire.
« évoluer vers un nouveau modèle qui renouvelle nos façons de consommer, de produire, de travailler, de vivre ensemble », objectif ambitieux de la transition écologique de Christophe Béchu. Pour ce faire, il promet « un territoire intelligent », avec des lampadaires intelligents et des canalisations futées…
La connerie ne sera plus de mise en Anjou. Une citation de Pierre Desproges résume bien l’actuelle situation politique angevine : « L’élite de ce pays permet de faire et défaire les modes, suivant la maxime qui proclame : "Je pense, donc tu suis." »

Et voilà tout l’enjeu électoral. Une simple histoire de vert à moitié vide ou à moitié plein. Le saupoudrage médiatique écolo à coup de vélos, de trottinettes électriques, d’abris à volatiles permet à l’électeur·trice de ne se concentrer que sur une des deux parties ce qui induit de rendre celle-ci plus importante que l’autre. L’optimiste pointera des réalisations intelligentes, selon les éléments de langage de la novlangue écolo-libérale , le pessimiste s’inquiétera à tort de cette foutue friche.

Restait à activer les réseaux. Béchu est passé maître dans cet art. Établir une tête de pont écologique pour espérer siphonner l’électorat. La campagne électorale fleurant bon l’écologie, il ne pouvait pas louper son casting avec des visages de la transition écologique dont une ex-sénatrice EELV. Passer pour l’incontournable maire écolo, qu’à cela ne tienne, en février, il se rendit au Change NOW Summit, à Paris, pour côtoyer les décideurs en habits vert et présenter son territoire intelligent. Pensez donc, un projet de 178 millions d’euros pour l’agglo...et la friche dans tout cela ? En juin 2020, les rencontres de l’écologie, organisées par la Croix, pas Javel, l’autre se tiendront à Angers et y aura qui ? Hulot ,Orphelin et des entrepreneurs de l’environnement bien sûr...C’est que l’édile ne perd pas sa cible de vue : l’écologie ? Non . Sa notoriété nationale voire internationale car l ‘homme vise haut, le bougre ! Et il entend coupler écologie et technologie numérique en bon écolo-libéral. . Et oui, l’écologie pour lui c’est capital. C’est que cela fleure bon les capitaux : Angers, terre d’électronique se devait de renouer avec son passé industriel, passé mais pas passif .

En novembre 2017 il organisa le World Electronics Forum, puis ce fut la labellisation de l’écosystème French Tech, la mise en place le cluster we network ... Bref, un territoire anglicisé pour paraître plus intelligent et ramener le citoyen à sa juste dimension. Une parodie de diafoirus de Molière, pédant qui aime utiliser une terminologie scientifique élaborée mais ne se préoccupe pas excessivement de la santé de son territoire si on se réfère toujours à la friche !

C’est que l’édile n’en est pas à son premier coup. En 2012, le même Béchu au sujet de sa participation au club Bilderberg, nous avait conseillé : « Arrêtons de fantasmer sur ce groupe ... ! « Le profil, c’est 15 % d’élus... » Or, cette année là, mon bon Christophe, tu aurais pu côtoyer Pascal Lamy, directeur général de l’Organisation mondiale du commerce, la vice présidente du forum économique mondial de Davos, des représentants de grandes banques, le pdg d’Axa, des grands dirigeants : Michelin, Fiat, Saint Gobain...et toi tu n’aurais retenu que ta rencontre avec un joueur d’échecs ?

Il ne faut pas nous prendre que pour des con-citoyen·nes !. Notre intelligence vaut bien celle d’un lampadaire ou d’une tuyauterie de ton territoire...
Mais sur quoi repose cette grande vision intelligente des territoires ? 1/3 seulement des personnes interrogées déclarent en avoir déjà entendu parler et pour 28 % cela reste flou.

Comme quoi, l’intelligence ne semble pas donné à tout le monde !

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